Anecdote : J'ai découvert Thierry di Rollo grâce aux Trois reliques d'Orvil Fisher que
j'ai acheté parce que j'ai trouvé la couverture vraiment magnifique et
je n'ai jamais regretté cette impulsion. Depuis, je me noie dans
l'univers sombre de cet auteur avec grand plaisir.
Titre : Crépuscules
Auteur : Thierry di Rollo
Éditeur :
actusf (collection les 3 souhaits)
Nombre de pages : 108
Prix : 8 €
Illustration : Lasth
Quatrième de couverture
: Thierry Di Rollo est l’une des voix les plus passionnantes de la
science-fiction en France. Chacune de ses histoires possède une force
peu commune avec une poésie du désespoir effroyablement belle. Si ses
univers sont noirs, c’est pour mieux dénoncer la folie humaine et tous
les abus de notre société.
En six nouvelles, il nous
entraîne dans des futurs qui déchantent et qui interpellent. Vous
visiterez les mines de la planète Loren III, découvrirez d’étranges
hippopotames chercheurs d’or, assisterez à des crucifixions puis, dans
un autre récit, à l’étrange résurrection de cadavres...
Des textes superbes dans lesquels la mort n’est présente que pour mieux célébrer la vie.
Né
en 1959 à Lyon, Thierry Di Rollo est l’auteur de plusieurs romans, dont
La Lumière des Morts, La Profondeur des tombes et Le Syndrome de
l’éléphant. Après Cendres, Crépuscules est son deuxième recueil chez
Actusf.
Mon avis : Ce court recueil est une
petite merveille. J'y ai retrouvé tout ce que j'avais aimé chez Orvil
Fisher et plus encore. Les six nouvelles qui la composent possèdent
chacune leur souffle propre mais on retrouve en filigrane un sentiment
de mal-être, un côté sombre qui agit comme un fil rouge sur l'ensemble
du recueil. Les textes sont sans espoir, lents parfois, durs et
terribles souvent, et possèdent cette force évocatrice qui permet au
lecteur de sentir le texte, de l'absorber et d'avoir, une heure, un
jour, un mois après la lecture, cet arrière-goût particulier sur
l'esprit qui donne envie de replonger dans les univers de Thierry di
Rollo.
Avec Éléphants bleus, la première
nouvelle, on découvre l'auteur de SF, celui qui peint la noirceur des
mondes et donne aux animaux de la savane une place prépondérante.
J'avais aimé les descriptions des girafes dans Les trois reliques
d'Orvil Fisher, j'ai retrouvé ici la même magie dans celles des
éléphants bleus. Mais il ne faut pas s'y tromper, la nouvelle n'est pas
centrée sur eux. On suit ici une enquête sur Loren III, planète minière
sur laquelle des mineurs meurent de manière étrange. Les mines et les
entrepôts emplis de travailleurs offrent un décor poussiéreux, une
atmosphère suffocante. L'intrigue autour de la mort de mineurs et leur
relation avec d'étranges oiseaux est palpitante et la fin, touchée par
une légère mélancolie m'a beaucoup touchée.
On reste dans le même univers (mais sur une autre planète) avec Hippo !
qui nous fait suivre le développement d'une nouvelle IA à l'apparence
d'hippopotame qui permet d'aller fouiller le fond des fleuves à la
recherche de l'or enfouit dans la vase.
L'ambiance est un peu
moins forte que dans la nouvelle précédente mais la nouvelle est plus
rythmée. C'est tout aussi agréable à lire et l'idée d'IA en forme
d'hippopotames parfaitement justifiée et gagatisante pour quelqu'un qui,
comme moi, aime ces espèces de grosses bêtes.
Seconde mort
m'a laissé un goût étrange sur les lèvres. J'ai été surprise de revenir
au fantastique après mon intrusion dans la SF de Thierry di Rollo aussi
j'ai eu un peu de mal à entrer dans la nouvelle mais rapidement, les
personnages se sont imposés à moi et je me suis laissée emporter.
Seconde mort c'est une histoire d'amour et de foi (pas religieuse, non,
mystérieuse plutôt, celle qui vous fait voir au-delà du mur des
réalités). C'est un texte assez étrange, parfois saccadé au début mais
qui prend son envole petit à petit jusqu'à cette superbe dernière phrase
que j'ai lue et relue à haute voix, comme une prière pour le
personnage.
Un dernier sourire
est la nouvelle que j'ai préférée du recueil. Elle est courte,
puissante et très évocatrice. Je ne peux en dire trop pour ne pas
spoiler tellement elle condense toutes les informations en un seul poing
qu'elle vous envoie à la figure par la suite. La thématique peut
paraître classique mais j'ai trouvé là une vision intéressante de l'âme
humaine et de la notion de monstre.
La ville où la mort n'existait pas est,
pour moi, une sorte de parenthèse, comme un souffle dans le recueil,
pour mieux amener la dernière nouvelle. Il est question, ici, d'une
histoire à rebours qui commence le réveil dans un cercueil et la
transformation, progressive, du mort en vivant. La réflexion sur les
changements incontrôlables et sur les réactions qu'ils entraînement est
intéressante à suivre et le texte coule, fluide, au rythme de cette
évolution à contre-courant.
La dernière nouvelle clôt avec brio ce court recueil. Tournée autour de la religion et la crucifixion,
Le crépuscule des dieux
est un texte tout en nuances et en mystère. Je n'ai pas tout compris à
la première lecture et je pense que même après deux relectures, je n'en
ai pas saisi toutes les subtilités. Cela ne m'a pas empêché de profiter
de la fluidité et de l'atmosphère oppressante qui règne ici. Il y a une
poésie certaine qui se dégage des dialogues et des réflexions des
personnages et même si je suis passée à côté du sens profond de ce
texte, il n'a pas atténué mon plaisir de lectrice ni par rapport à la
nouvelle, ni par rapport à l'ensemble du recueil.
I.